Le bonheur de Dieu : la fondation de l’hédonisme chrétien

Le Bonheur de Dieu : la fondation de l’hédonisme chrétien[1]

Par John Piper[2]

Jeremie 32:36-41 : «Et maintenant, voilà pourquoi 
l’Éternel, le Dieu d’Israël, parle ainsi 
sur cette ville dont vous dites :
eElle sera livrée entre les mains du roi de Babylone, 
(vaincue) par l’épée, par la famine et par la peste :
 Voici : je les rassemblerai
 de tous les pays où je les ai bannis
 dans ma colère, dans ma fureur
 et dans ma grande indignation; 
je les ramènerai dans ce lieu 
et je les ferai habiter en sécurité.
 Ils seront mon peuple,
 et je serai leur Dieu.
 Je leur donnerai un même cœur 
et une même conduite,
 afin qu’ils me craignent pour toujours,
 pour leur bonheur et celui de leurs fils après eux.
 Je conclurai avec eux une alliance éternelle, 
je ne me détournerai plus d’eux,
 je leur ferai du bien,
 et je mettrai ma crainte dans leur cœur,
 afin qu’ils ne s’écartent pas de moi.
 Je me réjouirai à leur sujet, pour leur faire du bien,
 et je les planterai véritablement dans ce pays,
 te tout mon cœur et de toute mon âme».

J’ai évoqué l’idée de l’hédonisme chrétien dans un culte de dimanche et, après, un parent est venu me parler et me disait, « Savez-vous que notre fille a cru que vous disiez ‘paganisme chrétien‘ ? »(Note du traducteur : en anglais, hedonism, « hédonisme », se prononce à peu près comme heathenism, « paganisme »). Je sais que, même si je réussis à le prononcer clairement (Hédonisme Chrétien), il y en a parmi vous ceux qui penseront toujours au « paganisme », car vous croyez que l’hédonisme est une philosophie de vie païenne. Et vous avez probablement raison, car le sens populaire du mot hédonisme est la recherche du plaisir et l’indifférence morale.

En 2 Timothée 3/4 Paul a prévenu qu’à la fin des temps les hommes aimeront « leur plaisir plus que Dieu ». Et nous sommes sans doute dans ces temps.

Commentaire du Sarment : L’hédonisme (du grec ancien : ἡδονή / hēdonḗ, « plaisir » et du suffixe -ισμός / -ismós) est une doctrine philosophique grecque selon laquelle la recherche du plaisir et l’évitement du déplaisir constituent l’objectif de l’existence humaine. On y développe la motivation de l’activité économique par la recherche du maximum de satisfaction par le minimum d’efforts. Pour l’hédonisme, le plaisir est le bien unique et suprême dans la vie, et la recherche du plaisir représente la fin idéale de toute conduite. Dans la Grèce antique, deux importantes théories hédonistes furent exposées, les cyrénaïques et les épicuriens.[3]

Le paganisme chrétien ?

Il y a deux ans, Daniel Yankelovitch a publié un livre dont le titre est New Rules: Searching for Self-Fulfillment in a World Turned Upside Down [Les nouvelles règles : Cherchant l’épanouissement de soi dans un monde à l’envers]. Il explique, en s’appuyant sur plusieurs interviews et des sondages nationaux, qu’il y a eu des immenses modifications dans notre culture, que la quête pour l’épanouissement de soi a créé de nouvelles règles qui gouvernent la manière dont nous, en tant qu’Américains, pensons et nous sentons. Il dit : « Dans leur forme extrême, ces règles ne font que retourner les vieilles règles et à la place de l’ancienne morale de sacrifice de soi on trouve des gens qui refusent de se priver de quoi que ce soit – pas à cause d’un appétit sans fond, mais par l’étrange principe moral que ‘j’ai un devoir envers moi-même’ » (p. xviii). Il raconte l’histoire d’une jeune trentenaire qui se plaignait à son psychothérapeute qu’elle devenait angoissée et irritable car la vie était devenue trop effrénée – trop de grands weekends, trop de discos, trop de longues soirées, trop de bavardage, trop de vin, trop d’herbe (canabis), trop d’ébats amoureux.

« Pourquoi ne vous arrêtez-vous pas ? », proposa gentiment le thérapeute.

La patiente le fixa d’un regard absent un petit moment, et puis son visage s’éclaira, comme éblouie d’une illumination : « Vous voulez dire que je ne suis pas vraiment obligée de faire ce que j’ai envie de faire ? » s’exclama-t- elle, stupéfaite.

La marque de reconnaissance de ces nouveaux consommateurs qui cherchent l’épanouissement de soi est qu’ils « opèrent en supposant que les envies émotionnelles soient des objets sacrées, et que ce serait un crime contre la nature de contenir un besoin émotionnel » (p. 59). « Notre ère, est la première dans laquelle des dizaines de millions de gens offrent, en tant que justification morale pour leurs actions, l’idée qu’un ‘soi’ intériorisé, et peut être même plus ‘réel’, ne correspond pas bien à leur rôle social qui leur a été attribué. »

Il se peut que l’espace dans lequel ces comportements et leurs nouvelles règles aient causé d’énormes bouleversement soit l’institution du mariage. Yankelovitch a une bonne analyse lorsqu’il dit, « les mariages réussis sont tressés de plusieurs fils de désirs inhibés – des accessions aux désirs de l’autre ; l’acceptation des infractions sur ses propres désirs ; des déceptions ravalées, des confrontations évitées ; des occasions de se fâcher qui ont été laissées de côté ; des occasions de s’exprimer qui ont été atténuées. D’introduire cette forte impulsion de l’épanouissement de soi dans ce processus est comme si on arrachait une délicate toile d’araignée avec un balai. Souvent, tout ce qui reste n’est que la matière collante qui adhère au balai ; la structure de la toile est détruite » (76).

J’ai alors une profonde empathie avec ceux et celles d’entre vous qui sont assez libres de notre culture afin de pouvoir réagir au mot hédonisme en disant, « C’est bien assez ! Nos maisons, nos écoles, nos entreprises et notre société sont en train d’être détruites par ces hédonistes qui cherchent l’épanouissement de soi qui n’ont plus rien du courage moral, du sacrifice de soi, du rude engagement ni de l’alliance sacrificielle qui maintiennent les structures précieuses de la vie et qui apportent une noblesse à notre culture. On n’a pas besoin d’hédonisme ; on a besoin de retourner vers la rectitude, l’intégrité, la prudence, la justice, la tempérance, au caractère et la maîtrise de soi ! » Croyez-moi, on est (l’auteur parle du christianisme) probablement plus près de cet hédonisme qu’on ne le pense. Tout ce que je vous demande c’est que vous m’accordiez votre attention avec discernement pendant les neuf semaines qui suivent avant de faire vos jugements définitifs sur l’hédonisme chrétien.

Des exemples bibliques de l’hédonisme chrétien

Parfois une illustration vaut mille mots d’une définition abstraite. Ainsi, au lieu de vous donner une définition précise de l’hédonisme chrétien, commençons en donnant quelques exemples bibliques.

David donne des conseils dans l’axe de l’hédonisme chrétien lorsqu’il commande, « Fais de l’Éternel tes délices, et il te donnera ce que ton cœur désire » (Psaume 37 : 4). Il démontre aussi le noyau de l’hédonisme chrétien lorsqu’il s’écrit, « Comme une biche soupire après des courants d’eau, ainsi mon âme soupire après toi, ô mon Dieu ! Mon âme a soif de Dieu, de Dieu vivant » (Psaume 42 : 2-3). Moïse était un hédoniste chrétien (selon Hébreux 11 : 24-27) car il rejetait la « jouissance amère du péché », mais « estimait en effet que l’opprobre du Christ était une plus grande richesse que les trésors de l’Égypte ; car il regardait plus loin, vers la récompense ». Les saints décrits en Hébreux 10.34 étaient des hédonistes chrétiens car ils ont choisi de prendre le risque pour visiter des prisonniers chrétiens et ont accepté avec joie le pillage de leurs propres biens, car ils savaient qu’ils possédaient quelque chose de bien meilleur qui ne périrait jamais. L’apôtre Paul a loué l’hédonisme chrétien lorsqu’il disait en Romains 12 : 8, « que celui qui exhorte [le fasse] avec joie ». Et Jésus Christ, celui qui est l’auteur de la foi et qui mène à la perfection, a établi la norme de l’hédonisme chrétien, car « il respirera (son plaisir est) dans la crainte de l’Éternel » (Ésaïe 11 : 3), et à cause de la joie qui l’attendait, il a supporté la croix, méprisé la honte, et s’est assis à la droite du trône de Dieu (Hébreux 12 : 2).

Commentaire du Sarment : Après avoir établi clairement qu’il existe une définition traditionnelle de l’hédonisme qui relève du paganisme (son premier paragraphe), John Piper s’emploie à christianiser cette philosophie. Les références bibliques évoquant le plaisir de connaître Dieu, la joie de marcher dans ses voies, sont reprises et incorporées dans un hédonisme sanctifié, pour faire de la joie et du plaisir spirituel un but, ce qui n’est pas enseigné dans les Écritures.

Ce qui ressort de cette entreprise (et de l’emploi de l’expression « hédonisme/iste chrétien» à 24 reprises dans cet article), c’est la volonté de légitimer une idée : le christianisme serait le vrai plaisir, la vraie joie, le vrai bonheur. Il n’y a donc plus de honte à rechercher du plaisir dans la vie chrétienne, ni d’associer ce mot à la foi.

Il s’agit d’un exercice probablement sincère de dépoussiérage d’un vieux christianisme religieux et névrosé, à l’intérieur d’une culture religieuse américaine à la dérive, comme le dénoncent certains prophètes modernes[4].

L’hédonisme chrétien enseigne que le désir d’être heureux est un don de Dieu qui ne doit être ni refusé ni résisté, mais qui devrait être dirigé vers Dieu afin d’être satisfait. L’hédonisme chrétien ne dit absolument pas que tout ce que vous aimez est bien. Il dit que Dieu vous a montré ce qui est bien, et de le faire devrait vous donner de la joie (Michée 6 : 8).

Commentaire du Sarment : C’est un point très important. L’auteur nous dit que l’hédonisme chrétien consiste à aimer la volonté de Dieu, et à être heureux en la faisant. Jadis, on appelait ça l’obéissance, la foi, ou la consécration. C’est ainsi qu’on identifiait la marche chrétienne et la vie de l’Esprit. Aujourd’hui on rebaptise les anciens chemins en leur donnant des noms qui sonnent mieux, qui font moins peur : obéir à Dieu par plaisir, marcher par la foi dans la joie, c’est beaucoup plus attractif.

Il se pose malgré tout la question du renoncement à sa volonté propre, qui est la marque caractéristique de la vie du disciple[5]. Il s’agit là d’une somme d’expériences qui ne portent pas la marque du plaisir, ni de la joie, mais qui cependant donneront un fruit spirituel extraordinaire : «Or aucune discipline, pour le présent, ne semble être un sujet de joie, mais de tristesse; mais plus tard, elle rend le fruit paisible de la justice à ceux qui sont exercés par elle» (Hébreux 12/11).

Puisque faire la volonté de Dieu devrait vous apporter de la joie, la recherche de la joie est une partie essentielle de tout effort moral.

Commentaire du Sarment : Il faut savoir de quelle joie nous parlons. S’il s’agit de la joie de Dieu, alors c’est l’affaire de Dieu de nous donner d’expérimenter sa joie, la joie de l’Esprit. C’est lui qui administre cette économie, et nous voyons bien au travers des Écritures que les enseignants, témoins et prophètes, parlent davantage de la foi que de la joie. En revanche, s’il s’agit de notre joie, c’est-à-dire de la satisfaction de bien faire, alors c’est tout autre chose. Si j’obéis à Dieu pour être heureux, alors ce n’est pas Dieu que je cherche, mais c’est moi-même. Je fais de Dieu le moyen de mon bonheur, alors que les Écritures révèlent que Dieu désire se révéler comme le But.

Le fondement de la philosophie hédoniste consiste à positiver l’ensemble de l’existence, afin de faire de la recherche du plaisir (dans le sens de plaisant) un art de vivre, l’alpha et l’omega de la vie.

Si vous abandonnez la recherche de la joie (et ainsi refusez d’être hédoniste, dans le sens que j’utilise ce terme), vous ne pouvez pas réaliser la volonté de Dieu

Commentaire du Sarment : il s’agit ici d’une phrase-clé, qui va faire passer l’esprit du lecteur en mode verrouillage. C’est bien davantage qu’un conseil, davantage qu’un défi, c’est une porte à franchir: si tu ne l’ouvres pas, tu seras coupé de l’accomplissement de la volonté de Dieu, donc coupé de Dieu. Ce qui signifie que tout chrétien qui ne souscrirait pas à cette vision de l’hédonisme chrétien sera déclaré dans l’erreur …

L’hédonisme chrétien affirme que les saints les plus pieux de chaque époque n’ont découvert aucune contradiction en disant, d’un côté, « l’on nous met à mort tout le jour. On nous considère comme des brebis qu’on égorge » (Romains 8 : 36), et de l’autre côté, « Réjouissez-vous toujours dans le Seigneur ; je le répète, réjouissez-vous » (Philippiens 4 : 4).

Commentaire du Sarment : L’idée présentée ici relève du sophisme. L’exhortation biblique à se réjouir s’appuye sur les choses invisibles et futures, tandis que l’hédonisme (chrétien ou pas) a besoin de trouver une joie, un plaisir, qui devient une raison d’être de la relation et de la marche, sinon ça n’a pas de sens. La Bible parle de FOI, l’hédonisme chrétien en a-t-il besoin ? puisque son objectif déclaré est le plaisir et la joie. L’intention est sans doute de faire du christianisme la religion du bonheur, une vie spirituelle basée sur la joie. Il est rigoureusement exact que la Bible parle de joie (et de plaisirs), mais elle situe clairement le centre de gravité de l’Esprit – a minima – entre la souffrance et la joie. Certains parmi les pères de la foi disaient même que le véritable point d’origine de la vie de l’Esprit (de laquelle découle toute joie authentique) ne pouvait provenir que de la mort et de la croix…

Hébreux 12 (cité par John Piper au paragraphe précédent) précise d’ailleurs très bien les choses : « Christ … EN VUE de la joie qui lui était réservée … a souffert la croix» : ce qui était clairement annoncé par Esaïe 53/10 : «S’il livre son âme en sacrifice (à la souffrance), il verra …». Nous pourrions dire que le fondement chrétien personnel de chacun est similaire dans le principe : « Je vous exhorte donc, frères, par les compassions de Dieu, à offrir vos corps comme un sacrifice vivant, saint, agréable à Dieu, ce qui sera de votre part un culte raisonnable » (Romains 12:1).

La joie qui naît de l’obéissance de la croix est une réalité précieuse. Si nous voulons enseigner cette joie, il nous faut enseigner au préalable la croix, le renoncement et la confiance qui mène à l’obéissance. La Bible ne dit jamais qu’on entre dans notre héritage par la joie, mais par la foi et l’obéissance. Enseigner que tout commence par la joie, c’est commencer son repas par le dessert — ce qui est typiquement hédoniste ! «L’héritage acquis avec hâte au début, ne sera pas béni à la fin » (Proverbes 20/21).

L’hédonisme chrétien ne se rejoint pas à la culture d’auto-gratification qui vous rend esclave de vos élans de pécheur. L’hédonisme chrétien nous ordonne de ne pas nous conformer au monde présent, mais qu’on soit transformé par le renouvellement de l’intelligence (Romains 12 : 2), afin de pouvoir prendre plaisir en la volonté de notre Père céleste.

Commentaire du Sarment : Ce n’est pas l’hédonisme chrétien qui nous ordonne de ne pas nous conformer au siècle présent, mais c’est la Parole de Dieu. On entend bien la substitution du concept par l’auteur ! Et elle le fait (la Bible) en condamnant nos pratiques naturelles et en nous exhortant à les abandonner, ce qui permettra alors le renouvellement de notre intelligence. Et ce processus sera rarement sans prix, entraînera bien des combats, bien des luttes qui seront rarement des sujets de joie, mais qui seront parfois des sujets de souffrance. La joie peut venir après, mais il serait faux d’enseigner aujourd’hui le christianisme en déconstruisant la prédication de la croix pour lui substituer le concept de l’hédonisme chrétien !

Selon l’hédonisme chrétien, la joie en Dieu n’est pas la cerise sur le gâteau du Christianisme. Quand vous y pensez, la joie en Dieu est une partie essentielle d’une foi qui sauve.

Commentaire du Sarment : L’auteur concède que la joie peut être réservée à une expérience future (en citant Hébreux 12/2) et que le chrétien peut se trouver en situation de marcher dans la volonté de Dieu sans la joie … puis il nous dit que la joie en Dieu n’est pas la cerise sur le gâteau du christianisme… C’est parce qu’il n’est pas simple de conceptualiser la joie spirituelle ! On ne peut pas l’enfermer dans un schéma, un comportement. John Piper a raison de donner de l’importance à la joie spirituelle, mais son insistance à en faire la porte et le crédo de la vie chrétienne est excessive. Ce genre d’enseignement peut sans doute trouver plus facilement un auditoire complaisant aux Etats-Unis qu’en Europe, tout simplement parce qu’en dépit des efforts de l’auteur pour le légitimer bibliquement, l’hédonisme chrétien est une pure invention du christianisme de la fin des temps, qui ne sait plus quoi inventer pour faire oublier ce qui fait la véritable force de la piété. Et qui peut contribuer à amener à renier ce qui fait la force de la piété.  

Aujourd’hui je veux dévoiler pour vous la fondation de l’hédonisme chrétien : le bonheur de Dieu. Je vais essayer d’appuyer trois observations des Écritures : 1) Dieu est content, car il trouve du plaisir en lui-même. 2) Dieu est content parce qu’il est souverain. 3) Le bonheur de Dieu est la fondation de l’hédonisme chrétien, car le résultat pour nous est la miséricorde.

 

Dieu trouve son plaisir en lui-même

D’abord, Dieu est content, car il trouve du plaisir en lui-même. Dieu serait injuste s’il estimait quelque chose plus que ce qui a une valeur suprême. Et c’est lui qui a la valeur suprême. S’il ne prenait pas un plaisir infini en sa propre gloire il serait injuste, car c’est bien de prendre du plaisir en quelqu’un selon l’excellence de leur gloire

Commentaire du Sarment : Tentative anthropomorphique[6] de définition de Dieu qui ne sert qu’à justifier le propos de l’auteur. La joie qui a besoin d’une cause, ce n’est pas de la joie, c’est du plaisir.[7]

Les Écritures sont saturées des textes qui montrent comment Dieu agit selon un amour inébranlable pour sa propre gloire

« C’est pour l’amour de moi, pour l’amour de moi que je veux agir ; car comment mon nom serait-il profané ? Je ne donnerai pas ma gloire à un autre » (Ésaïe 48 : 11)

La même chose apparaît lorsqu’on pense à la relation entre Dieu le Père et Dieu le Fils. Il y a là un mystère qui surpasse la compréhension humaine. Et il faut admettre que nos efforts en théologie de décrire la manière dont Dieu est conscient de soi-même et de sa relation avec la Trinité sont comme le bégaiement d’un jeune enfant lorsqu’il tente de décrire son père.

Mais, selon les Écritures, même par la bouche des enfants peut venir de la sagesse. Les Écritures enseignent que Jésus Christ, le Fils de Dieu, est Dieu (Jean 1 : 1). Et en Hébreux 1 : 3 il est dit qu’il « est le rayonnement de [la gloire de Dieu] et l’expression de son être. » 2 Corinthiens 4 : 4 parle de la gloire de Christ, qui est l’image de Dieu. De ces passages on apprend que, depuis toute l’éternité, Dieu le Père contempla l’image de sa propre gloire qui est parfaitement représentée en la personne de son Fils. Une des meilleures façons de penser à l’immense joie que Dieu a dans sa gloire est d’y penser comme étant la joie qu’il a dans son Fils, qui est l’image de cette gloire. Lorsque Jésus entra dans le monde, Dieu le Père dit, « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j’ai mis toute mon affection » (Matthieu 3 : 17). Quand Dieu le Père perçoit la gloire de sa propre essence incarnée dans le personnage de son Fils, il est infiniment heureux.

« Voici mon serviteur auquel je tiens fermement » (Ésaïe 42 : 1). Alors la première observation c’est que Dieu est content car il trouve du plaisir en lui-même, surtout lorsque sa nature se reflète dans son Fils bien-aimé.

Dieu est souverain

Deuxièmement, Dieu est content parce qu’il est souverain.

Psaume 115 : 3 déclare : « Notre Dieu est au ciel, il fait tout ce qu’il veut ». Ce verset implique que la souveraineté de Dieu est son droit et son pouvoir de faire tout ce qui le rend heureux.

Notre Dieu est au ciel – il est au-dessus de tout et sujet de personne . C’est pourquoi, il fait tout ce qu’il veut – il agit toujours avec le but de préserver sa joie maximale. Dieu est content, car ses actes justes, qu’il fait toujours par amour de sa propre gloire, ne peuvent jamais être frustrés au-delà de sa volonté. Ésaïe 43 : 13, « C’est moi qui suis Dieu. Je le suis dès avant que le jour fût, et nul ne délivre de ma main ; j’agirai et qui s’opposera ? » Ésaïe 46 : 10, « Mon projet tiendra bon, et j’exécuterai tout ce que je désire. » Daniel 4 : 35, « il agit comme il lui plaît avec l’armée des cieux et avec les habitants de la terre, et il n’y a personne qui résiste à sa main et lui dise : Que fais-tu ? ’» On peut alors être sûr que Dieu soit infiniment heureux, car il a le droit et le pouvoir absolus, en tant que Créateur, de surmonter toute obstacle à sa joie.

Il vaut la peine de se demander ici, comme parenthèse, comment exactement un Dieu bon peut être heureux lorsque le monde est traversé par le péché et le mal. C’est une question bien grande et difficile.

Il y a deux choses qui m’aident face à cette question. L’une est : que cela ne sert pas à grand-chose de tenter de sauver la réputation de Dieu en disant qu’il n’est pas vraiment responsable. Si quelqu’un avait tenté de me consoler en décembre 1974 lorsque ma mère fut tuée dans un incident d’autobus, en disant que, « Dieu ne voulait pas que cela arrive; tu peux toujours avoir de la confiance en lui ; il est bon, » j’aurais répondu en disant, « ma consolation ne vient pas de la pensée que Dieu est tellement faible qu’il n’a pas pu détourner le bois de construction sur le toit d’une fourgonnette VW. Mon Dieu est souverain. C’est lui qui l’a prise à son heure nommée; et je crois fermement maintenant qu’un jour dans l’avenir, je verrai que c’était pour le bien. Car j’ai appris en Jésus-Christ, que Dieu est bon ». La solution biblique pour le problème du mal n’est pas de dérober à Dieu sa souveraineté.

L’autre observation qui m’aide à répondre à cette question est que l’attitude de Dieu envers les événements tragiques dépend de la mise au point de l’objectif. Dieu ne prend aucun plaisir en la douleur et le mal tout simplement. Quand son objectif est étroit et seulement concentré sur cela, il peut être comblé de chagrin et de douleur. Mais, quand il ouvre son objectif pour voir toutes les connections et tout les effets d’un événement, même jusqu’à l’éternité, cet événement crée un scénario ou bien une mosaïque en lequel il prend plaisir et qui suit sa volonté. Par exemple, la mort du Christ fut l’œuvre de Dieu le Père. « Et nous, nous l’avons considéré comme atteint d’une plaie ; comme frappé par Dieu et humilié…il a plu à l’Éternel de le briser par la souffrance » (Ésaïe 53 : 4, 10). Mais, bien que Dieu le Père ait certainement vu l’angoisse de son Fils bien-aimé et la perversité qui l’a mené à la croix, il n’a pas ressenti du plaisir en ses événements eux-mêmes. Le péché en lui-même et la souffrance de l’innocent en elle-même est une horreur pour Dieu. Mais selon Hébreux 2 : 10, Il convenait en effet à Dieu le Père d’élever à la perfection, par la souffrance, l’auteur de notre salut. Dieu a voulu ce qu’il abhorre dans l’objectif étroit, car en la vue de l’objectif large de l’éternité, ce fut une manière convenable de montrer sa justice (Romains 3 : 25), et pour conduire plusieurs à la gloire (Hébreux 2 : 10). Lorsque Dieu, dans son omniscience, examine l’étendue de l’histoire de la rédemption du tout début jusqu’à la fin, il prend plaisir en ce qu’il voit. En conclusion, je dirai qu’il n’y a rien dans le monde entier qui soit capable de frustrer la joie ultime de Dieu. Il prend infiniment de plaisir à sa propre gloire, et dans sa souveraineté, il fait tout ce qui lui plaît.

Le bonheur de Dieu déborde de miséricorde envers nous

Tout cela nous mène à la dernière observation: Le bonheur de Dieu est la base de l’hédonisme chrétien, car son bonheur déborde de miséricorde envers nous. Pouvez-vous imaginer comment ce serait si le Dieu qui règne sur le monde entier n’était par heureux ?

Si Dieu était enclin à se plaindre, de faire la moue, d’être dépressif comme le géant dans les cieux de Jaques et le haricot magique ? Si Dieu était découragé, lugubre, sinistre, mécontent, abattu et énervé ? Pourrions-nous alors chanter ensemble avec David les paroles, « O Dieu ! Tu es mon dieu, je te cherche, mon âme a soif de toi, mon corps soupire après toi, dans une terre aride, desséchée, sans eau » (Psaume 63 : 2) ? Pas du tout ! On s’identifiera à lui tout comme les petits enfants s’identifient à un père qui est découragé, lugubre, sinistre et énervé. Ils ne peuvent pas se plaire avec lui, ils peuvent seulement essayer de l’éviter et, peut être, de travailler pour lui pour but de lui remonter le morale. C’est pourquoi la fondation de l’hédonisme chrétien est que Dieu est infiniment heureux, car le but de l’hédonisme chrétien, c’est de prendre plaisir en Dieu, d’être heureux en lui, d’aimer et de chérir notre communion avec lui.

Mais les enfants ne peuvent pas se plaire dans la présence de leur père s’il est lugubre, sinistre et énervé. Donc la base de l’hédonisme chrétien est que Dieu est le plus heureux de tous les êtres vivants.

En d’autres termes, pour qu’un pécheur puisse poursuivre sa joie en Dieu, il faut qu’il soit confiant que Dieu ne lui fermera pas la porte au nez lorsqu’il vient chercher le pardon et la communion. Comment pourrions-nous être encouragé que Dieu nous traitera avec miséricorde lorsqu’on se repent de nos péchés et qu’on vienne chercher la joie en lui ? Considérons cet encouragement de Jérémie 9 : 24, « ‘Je suis l’Éternel, qui exerce la bienveillance, le droit et la justice sur la terre ; car c’est à cela que je prends plaisir.’ » Dieu a de la miséricorde envers nous, parce que ça lui donne du plaisir. Dieu n’est pas forcé de sauver à cause d’un principe formel ou d’une règle fixe. La base de notre confiance en la miséricorde de Dieu est qu’il soit l’hédoniste chrétien parfait. Avant toute chose, il prend plaisir en son excellence divine. Son bonheur est si complet qu’il s’exprime par le plaisir qu’il ressent en le partageant avec les autres.

Écoutez le pouls de l’hédoniste parfait en Jérémie 32 : 40-41. Pourquoi Dieu fait-il le bien ? Comment fait-il pour t’aimer ? Ecoute :

Je conclurai avec eux une alliance éternelle, je ne me détournerai plus d’eux, je leur ferai du bien, et je mettrai ma crainte dans leur cœur, afin qu’ils ne s’écartent pas de moi. Je me réjouirai à leur sujet, pour leur faire du bien, et je les planterai véritablement dans ce pays, de tout mon cœur et de toute mon âme.

Dieu te fait du bien, car cela lui fait tellement plaisir! Il s’occupe de t’aimer de tout son cœur et de toute son âme. Le bonheur de Dieu qui déborde en l’amour joyeux est la base et l’exemple de l’hédonisme chrétien.

Commentaire du Sarment : La synthèse de l’amour de Dieu ici présentée, à partir de la déclaration de Jérémie, a singulièrement besoin d’être complétée. Cette alliance promise avec ce peuple est extraordinaire et montre effectivement l’étendue de Son amour. Mais elle intervient après des circonstances de jugements qui ont sanctionné sans appel un peuple rebelle. Il ne serait pas honnête de passer sous silence les épisodes qui ont conduit à cette déclaration, et qui parlent eux aussi de l’amour de Dieu, qui l’a conduit à abandonner ce peuple, à prononcer la destruction de Jérusalem, et une déportation finale. Alors oui : «Dieu veut te faire du bien parce que cela lui fait tellement plaisir !» Mais sans la foi, il sera impossible de lui plaire, et sans la croix, tu ne pourras pas être son disciple … ce qui signifie que tu seras privé de toute forme de joie de l’Esprit.

Je vais conclure avec une invitation. Ces promesses étonnantes et précieuses de la faveur de Dieu ne sont pas pour tous. Il y a une condition. Elle n’est pas une condition de travail ni de paiement. Un être souverain qui est infiniment heureux n’a pas besoin de ton travail et possède déjà tout ce que tu puisses posséder. La condition, est que tu deviennes un hédoniste chrétien – que tu arrêtes d’essayer de le payer ou de travailler pour lui ou de le fuir. Et, à la place, que tu commences à chercher, de tout ton cœur, la joie incomparable d’être en communion avec le Dieu vivant.

Ce n’est pas dans la vigueur du cheval qu’il se complaît,
 Ce n’est pas la robustesse de l’homme qu’il agrée ;
L’Éternel agrée ceux qui le craignent,
Ceux qui s’attendent à sa bienveillance. (Psaume 147 : 10-11)

La condition pour hériter toutes les promesses de Dieu, est que tu détournes vers lui tout l’espoir de bonheur que tu places sur toi-même, sur ta famille, ton emploi, et tes loisirs. « L’Éternel agrée ceux qui s’attendent à sa bienveillance ». « Fais de l’Éternel tes délices, et il te donnera ce que ton cœur désire » (Psaume 37 : 4).

Commentaire du Sarment : la citation de 2 Timothée qui est faite par l’auteur au premier paragraphe de cet article, est centrale, sur cette question du plaisir, et de l’amour du plaisir, en association avec la vie chrétienne. John Piper : «En 2 Timothée 3/4 Paul a prévenu qu’à la fin des temps les hommes aimeront « leur plaisir plus que Dieu ». Et nous sommes sans doute dans ces temps.»

En effet, l’apôtre ne parle pas seulement de l’état du monde non-chrétien, mais malheureusement aussi du monde chrétien, comme le prouve le verset suivant (5) : «ayant les apparences de la piété, tout en ayant renié ce qui en fait la force ». Les incroyants n’ont absolument pas à chercher à conserver «les apparences de la piété» puisque cette dernière les indiffère ! C’est donc bien à l’intérieur de la sphère de ceux qui croient en l’existence de Dieu, que l’intégration de la notion de plaisir doit prophétiquement poser problème. Et un enseignant sage se garderait sans doute soigneusement d’ouvrir une telle porte.

Dans le temps dont parle Paul à Timothée («Or sache ceci, que dans les derniers jours il surviendra des temps facheux…») et pour ces croyants-là, la frontière entre le monde et l’Église sera devenue si poreuse, que l’hédonisme ambiant (qui est une pensée naturelle) aura fini par réussir à pénétrer la doctrine et la pratique chrétienne, comme nous avons déjà commencé à le constater un peu partout, et particulièrement aux Etats-Unis, pays de John Piper.

Il semble que ce que l’auteur cherche, c’est à rendre son importance à la joie de connaître Dieu, de le servir, de donner sa vie pour lui. Mais le concept de l’hédonisme est irrémédiablement associé à la recherche du plaisir, aux antipodes de la vie de l’Esprit. Et non seulement la recherche du plaisir, mais la défiance de toute forme de déplaisir et de souffrance, ce qui représente l’antithèse de la Croix.

 

 

 

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ANNEXE

 

Critique du livre «Prendre plaisir en Dieu, de John Piper» sur le site Topchrétien[8], par Gérald Émery[9]

Voici un livre dont la première partie du titre  » Prendre plaisir  » semble attirante et pleine de vie, mais qui pourrait, malheureusement, faire perdre de l’intérêt par le sous-titre : réflexions d’un hédoniste chrétien. C’est là que les apparences où les raisonnements trop hâtifs face aux termes réflexions et hédoniste ne doivent pas nous arrêter car il y a dans cet ouvrage une richesse de réflexions et de vérités qui font littéralement du bien à l’âme.

La première phrase de la préface nous situe d’emblée alors que Piper écrit :  » Vous tenez entre vos mains un ouvrage sérieux sur la manière d’être heureux en Dieu « .

C’est une étude approfondie, sérieuse et digne d’intérêt sur la recherche du plaisir, oui, mais en Dieu. Il nous présente un hédonisme (signification littérale : la recherche du plaisir) dans une perspective du plan de Dieu pour chacune de nos vies. Tout au long de la lecture, on va de découvertes en découvertes concernant notre besoin d’être heureux, de la volonté de Dieu à cet égard et de l’importance des paroles de Jésus lorsqu’il nous parle de joie et plus particulièrement de sa joie.

En toile de fond de son approche, l’auteur veut permettre au chrétien de vivre l’ancien credo de foi  » Le but principal de l’homme est de glorifier Dieu et de faire sans cesse sa joie de lui  » et pour l’aider dans son cheminement, il propose de modifier légèrement la tradition ancienne en disant « Le but principal de l’homme est de glorifier Dieu en faisant sans cesse sa joie de lui « .

La lecture de ce livre sera d’autant plus enrichissante qu’elle sera faite dans la méditation, la réflexion et la prière. Ce n’est pas une petite chose que de chercher à glorifier Dieu. Dans ce désir et cette quête, le chrétien est amené à approfondir sa compréhension du bonheur, de la conversion, de l’adoration, de l’amour, de la prière, de l’argent, du mariage et de la mission.

Une lecture recommandée à tout chrétien désireux de glorifier Dieu et de vivre le bonheur . . . en espérant que ce soit là le désir de chacun.

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[1]http://www.desiringgod.org/sermons/the-happiness-of-god-foundation-for-christian-hedonism?lang=fr

[2] Présentation de John Piper sur le site de la CLC, qui vend son livre « Prendre plaisir en Dieu, Réflexions d’un hédoniste chrétien» : John Piper est né aux États-Unis. Il est pasteur retraité depuis 2011. Il est titulaire d’un doctorat de théologie de l’Université de Munich et a enseigné l’exégèse biblique au Bethel College à Saint Paul, Minnesota (États-Unis). Il est l’auteur de plus de trente livres dont plusieurs best-sellers. John et son épouse Noël ont cinq enfants.

[3] Sources : Encyclopédia Universalis, Wikipedia, Compilhistoire

[4] Voir notamment les écrits de David Wilkerson

[5] Luc 14, 25-27 : « De grandes foules faisaient route avec Jésus ; il se retourna et leur dit : « Si quelqu’un vient à moi sans haïr son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères, ses sœurs, et même à sa propre vie, il ne peut être mon disciple. Celui qui ne porte pas sa croix et ne marche pas à ma suite ne peut pas être mon disciple».

[6] L’anthropomorphisme est l’attribution de caractéristiques du comportement ou de la morphologie humaines à d’autres entités comme des dieux, des animaux, des objets, des phénomènes, voire des idées.

[7] Gustav Meyrink

[8] http://www.topchretien.com/topmessages/view/312/prendre-plaisir-en-dieu.html

[9]Gérald Emery est le Doyen Académique de l’Institut Biblique du Québec de Longueuil, sur la Rive Sud de Montréal (QC). Lui et son épouse Françoise sont aussi impliqués à l’Église Nouvelle Vie de Longueuil au sein du Ministère En toute Fraternité qui vient en aide aux personnes sans conjoint.

2 comments On Le bonheur de Dieu : la fondation de l’hédonisme chrétien

  • Bonjour Jérôme, j’ai peut-être loupé l’information sur le post, savons-nous de quand datent ces écrits de John Piper.

    • Bonjour Ingrid,
      Je ne suis pas certain d’avoir la bonne réponse à votre question, et les éléments que je possède sont glanés sur le Net.
      Le site de l’auteur (www.desiringgod.org) semble indiquer l’année 1983 pour l’édition en langue anglaise (publication d’articles comme : Le Bonheur de Dieu : la fondation de l’hédonisme chrétien). L’édition française du livre (Prendre plaisir en Dieu) daterait de 1993, mais tout ça est très indicatif.
      Personnellement j’ai pris connaissance des articles que j’ai commentés en 2014.

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